21 nuits avec Pattie

21 nuits avec Pattie

21 nuits avec Pattie est une comédie française réalisée par Arnaud et Jean-Marie Larrieu. Les deux frères signent cette fois un film assez personnel puisqu’ils sont même allés tourner dans une maison qu’ils avaient connue lors de leur enfance. L’histoire se passe de nos jours  alors que l’héroïne du film, Caroline (jouée par Isabelle Carrée), apprend la mort de sa mère. Même si elle ignorait presque tout de cette femme, la voilà en route pour la dernière maison de la défunte. Arrivée là-bas, elle rencontre Pattie (Karin Viard), la femme de ménage et amie de sa mère, qui a pour habitude de raconter de manière très explicite ses aventures sexuelles. Alors que Caroline espère pouvoir partir le plus rapidement possible après l’enterrement, le cadavre de sa mère disparait, elle se trouve bloquée sur place et plus ou moins obligée de faire connaissance avec tous les différents proches de sa mère.

Cette comédie est avant tout un film à dialogues. Et si en effet certaines tirades sont plutôt bien tournées, comme celle de Jean (André Dussollier) qui vient glorifier le troisième acte, ce n’est pas le cas de toutes les répliques. On sent la volonté des réalisateurs de parler de sexe sans en montrer, de simplement le suggérer. C’est logique d’ailleurs, le personnage principal avoue dès le début être totalement hermétique au désir et c’est donc normal que les longues tirades de Pattie ne lui fassent pas envie. En effet, les monologues de Karin Viard sont gênants, grossiers, grotesques, lourds, mais rarement drôles. Le parti-pris d’un personnage antipathique est un pari risqués et comme ce personnage monopolise les trois-quarts des dialogues, il devient difficile de ne pas perdre patience.  L’attachement à l’héroïne se fait un peu, mais elle nous est montrée comme quelqu’un d’éteint, de triste, vidé de toute émotion poignante.

Il n’y a aucun problème à faire un film composé principalement de dialogues, mais il faut alors que l’image arrive à s’adapter. On peut citer par exemple la Vénus à la fourrure (2013, Roman Polanski) qui a récemment démontré mille et une façons de filmer et d’éclairer un dialogue à deux dans un seul décor pendant une heure et demie. Dans 21 nuits avec Pattie les décors sont mal exploités et souvent filmés de façon beaucoup trop théâtrale : il y a un fond (un paysage, une maison, une forêt…), quelques accessoires comme une table et des chaises par exemple et enfin plusieurs acteurs, discutant à coup de champ contre champ truffés de problèmes de lumières, d’étalonnage ou même de raccords visuels basiques. En découle une accumulation de longueurs qui donne l’impression que le film s’éternise.

Certains plans sont pourtant très beaux, comme le surcadrage d’Isabelle Carrée devant la piscine qui possède une lumière sublime. Mais ces belles compositions sont vite contrastées par de nombreux plans qui sont dignes d’un film de vacances amateur. Malgré l’ambiance particulière et assez étrange qu’ils créent, les plans manquent de maîtrise. Le film, dans tout ce qu’il entreprend, a tendance à en faire trop. Beaucoup d’ambition certes et l’effort est louable, mais l’originalité du scénario est handicapée par sa lourdeur.

Pour ce qui est des acteurs, c’est aussi en demi-teinte. Certaines scènes sont très bien jouées et d’autres font clairement fausses. Alors oui ces dernières sont généralement des moments où les personnages mentent, mais à part sortir le spectateur du film, il n’y a pas grand intérêt à faire surjouer un acteur. Seul Denis Lavant arrive à s’en sortir et à nous proposer un personnage pas forcément original (du moins dans sa carrière) mais qui arrive tout de même à être attachant et crédible. Car c’est ça qui manque profondément à 21 nuits avec Pattie : de la crédibilité et de la cohérence. C’est vraiment dommage de gâcher un tel casting. Isabelle Carrée et Karin Viard arrivent quand même à insuffler une certaine complicité de jeu qui sauve plusieurs scènes.

Enfin, la bande de son du film est de très bonne facture. Ce mélange de sonorités venues de plusieurs époques apporte un rythme au long-métrage qui est très agréable. Les lenteurs du film sont d’ailleurs souvent relevés par cette musique entraînante et originale. 21 nuits avec Pattie souffre de plusieurs problèmes qui malheureusement enraillent son bon fonctionnement. Tout n’est bien entendu pas à jeter, mais le film laisse un arrière-gout d’inabouti.   

Nil-Enzo CLEMENTIN

Titre : 21 nuits avec Pattie

Réalisation : Arnaud et Jean-Marie Larrieu

Inteprétation: Karin Viard, Isabelle Carée, André Dussollier, Denis Lavant

Genre : Comédie

Sortie : 16 décembre 2015