Le coup de cœur de Pierre

La théorie du Y

Caroline Taillet et Martin Landmeters, 2016

La Théorie du Y est enfin de retour ! Après plus de deux ans d’attente, la websérie 50% hétéro de la RTBF, réalisée par Caroline Taillet et Martin Landmeters, a commencé sa saison 2 depuis le 17 octobre.

Pour ceux qui ne la connaitraient pas encore, La Théorie du Y raconte l’histoire d’Anna (Léone François), une jeune femme qui s’emmerde dans son couple avec Matteo (Colin Javaux). Pendant une soirée, celle-ci va tomber sous le charme d’une autre femme, Claire (Ophélie Honoré), ce qui va l’amener à se poser des questions sur son identité.

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La série traite de bisexualité, un domaine encore très largement sous-représenté dans les films et les séries, qui plus est dans les productions belges. Avec humour et ironie (et dans certaines scènes, une forme de brutalité crue et terrifiante), La Théorie du Y déconstruit petit à petit les préjugés liés à cette orientation sexuelle finalement méconnue. Les personnages sont très bien construits de ce point de vue-là, tous font preuve d’une complexité et d’une authenticité rarement vue à l’écran. Rien que pour ça, cette série est un must-see d’utilité publique. Ce n’est cependant pas son seul point fort. Le casting, par exemple, est assez épatant. On retrouve à la distribution plusieurs comédien.nes nous venant tout droit de Typique, une autre websérie que je vous conseille vivement et dont plusieurs épisodes avaient été tournés ici à l’ULB. C’est le cas notamment de Léone François et Colin Javaux, mais aussi d’Emilien Vekemans qui apparait ici dans un rôle secondaire.

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Additionnellement, l’ambiance sonore vaut également le détour. Les musiques utilisées, passant notamment par Cœur de Pirate ou Nina Simone, apportent une fraicheur bienvenue à toute la série. Tout cela avait permis à la première saison de devenir un véritable succès public et critique, avec de nombreuses récompenses gagnées dans plusieurs festivals (dont notamment le Prix du Jury au Swiss Web Festival ou le Prix du meilleur espoir féminin pour Léone François à l’International Online Webfest). Pour sa seconde saison, la série est toujours aussi intéressante, si pas plus ! Certains auraient pu craindre, qu’après une saison entière focalisée sur Anna et sa bisexualité, une certaine baisse de contenu serait inévitable. Ce n’est absolument pas le cas. Cette nouvelle salve d’épisodes parvient en effet à explorer encore davantage la fluidité des sexualités et la diversité de la communauté LGBT+ bruxelloise. Une thématique approfondie à travers Malik (Salim Talbi), devenu personnage principal en fin de première saison, qui gagne énormément en importance et profondeur ici, mais également via l’introduction du Boudoir, un café lesbien rejoint par Anna.

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Enfin, fidèle à son approche transmédia présente depuis le début de la série (il était en effet possible durant la diffusion de la première saison d’interagir avec Anna via Facebook), La Théorie du Y propose cette année une exposition itinérante sur l’amour entre femmes. Celle-ci, montée par Anna et les filles du Boudoir dans la série et aperçue dans l’épisode 8 de la saison 2, est ainsi réellement présente à la galerie Art et Flux, à Bruxelles.

Les épisodes sont disponibles sur Youtube : La Théorie du Y
Et sur Auvio.

Une diffusion télé est également prévue sur la Deux.

L’exposition Inverties est quant à elle présente à la galerie Art et Flux jusqu’au 10 novembre. Elle passera ensuite par Namur et Liège dans les mois suivants. Plus d’informations ici.

-Pierre, Graphiste du Cinéphage

Le post-scriptum de la rédaction

La théorie du Y s’impose dans la scène francophone comme la série qui traite sans détour des problèmes auxquels font face les membres de la communauté LGBTQIA+. Une production ambitieuse qui traite d’un sujet qui dérange souvent. La rédaction vous propose une petite incursion dans et autour de la production de La théorie du Y et de son sujet.

Pour le tournage d’une scène un des acteurs devait être maquillé pour interpréter un membre de la communauté homosexuelle qui critique Anna et sa bisexualité. Cependant en rentrant chez lui après le tournage il fut la cible de harcèlement de rue et de remarques. Un événement qui devint source de motivation pour l’équipe par la suite.

Caroline Taillet et Martin Landmeters se sont inspirés de leurs histoires personnelles et d’interviews de membres de la communauté lgbtqia+.Dans certains cas les acteurs jouaient des personnages basés sur eux-mêmes.Avant d’être une webserie, La théorie du Y est une pièce de théâtre. Ils furent repérés par un producteur de la RTBF, et furent financés par une collecte de fond.Caroline Taillet à réalisé un mémoire à l’AID sur « La bisexualité et le théâtre ».en 2018, UNIA reçu 278 signalements portants sur des comportements discriminatoires basés sur l’orientation sexuelle des victimes. soit presque 50% de plus qu’en 2017.Une étude de la FRA montre qu’en Belgique, 35% des individus interrogés se sont senti discriminé sur base de leur orientation sexuelle ou leur appartenance à la communauté LGBTQIA+.

Des chiffres qui ne représentent pas du tout l’entièreté des individus concernés par les problèmes soulevés par ces études. Des chiffres qui rendent toute sa légitimité à une série comme La théorie du Y.