Les Innocents de Frédéric Berthe – Ou quand les incohérences empiètent sur une enquête

L’épidémie de séries continue avec de nouvelles productions francophones régulières. Cette fois, le Kinovore a décidé de se pencher sur celle des Innocents, réalisée par Frédéric Berthe et dont la saison 1 a été diffusée il y a quelques semaines déjà.

Cette série a eu un résultat assez mitigé en regard des critiques des internautes. Je vais ici développer cette critique en 5 points, comme à mon habitude. J’attends de voir si vous êtes d’accord avec moi ou non. Ces cinq points se divisent de la sorte :  deux points très positifs, un point assez mitigé, et deux points négatifs.

Commençons avec l’un des éléments les plus positifs de cette série : son casting ! Certains acteurs m’étaient inconnus, comme Jules Houplain et Victor Meutelet (les deux jeunes au centre de la série) et je suis ravie de les avoir découverts. Mais on va principalement parler ici de l’incroyable Odile Vuillemin (Profilage, L’emprise) et du ténébreux Tomer Sisley (Largo Winch, Coup de foudre à noël).

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Pour être honnête, malgré mon addiction aux séries, je n’aurais probablement pas regardé Les innocents si ce n’est pour la présence d’Odile Vuillemin. Quel bonheur de la découvrir dans un rôle encore différent de ceux pour lesquels elle est principalement connue. Autant son personnage de Chloé Saint-Laurent (dans la très bonne série Profilage) me manque, et j’adorerais le revoir à l’écran ; autant celui d’Hélène Siquelande est très différent et c’est un bonheur de la voir dans un panel de rôles différents que Vuillemin peut interpréter. La voir dans un rôle sobre, en tant que gendarme embarquée dans une enquête improbable vu la région, est un véritable vent de fraîcheur par rapport à la très excentrique Chloé ou à l’avocate au passé trouble dans Né sous silence, etc. Bref, cette actrice est une pépite du cinéma et de la télévision française et les spectateurs ne peuvent que se réjouir de sa présence dans Les innocents.

Pour ce qui est de Sisley, c’est un plaisir de le voir dans un rôle aussi noir, fourbe et manipulateur ! Honnêtement, tout au long de la série, le spectateur cherche juste à comprendre la raison derrière chacun de ses actes, comment il en est arrivé là etc. Et Tomer Sisley ne déçoit pas dans ce rôle ! Il joue ici le vrai caméléon, endossant différents visages dans presque chacune de ses scènes, en fonction des personnages qu’il rencontre.

 

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Le deuxième point positif de cette série est son cadre époustouflant ! La série a été tournée dans l’Aude et les Pyrénées Orientales (Céret, Perpignan entre autres). Tout au long des épisodes, les prises de vues impressionnantes donnent une idée de la magnifique région qu’est l’Occitanie. On ne peut qu’admirer ces paysages idylliques. De plus, le réalisateur, très malin, place énormément de plan d’ensemble des personnages perdus dans le décor. Le spectateur en prend certainement plein la vue !

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Le troisième point de cette critique concerne la chronologie des révélations. En effet, c’est une particularité propre à la série. Dès le deuxième épisode, on sait qui est le coupable, quel est son métier, etc. La question est alors : qu’est-ce que la série va pouvoir raconter dans les quatre épisodes restants ? On est donc dans une situation étrange, sur un fil très fin et c’est un gros risque de révéler autant d’éléments dès le début. Pourquoi continuer à regarder si on sait qui est derrière les meurtres ? Personnellement, c’est une structure narrative qui me plaît énormément. L’intérêt n’est plus de découvrir l’identité du coupable, mais plutôt de savoir comment l’histoire va se développer et la manière dont le reste des personnages apprendra la vérité. Le problème est que beaucoup de ces révélations ont été amenées parfois de manière trop abrupte et avec un certain manque de subtilité et de crédibilité. La façon dont le personnage de Tomer Sisley découvre l’identité du témoin de son crime ne semble pas crédible pour un récit policier et certains spectateurs pourraient décrocher devant des éléments qui sont découverts de manière à faire avancer l’histoire mais sans subtilité, tel un deus ex machina. L’idée est très bonne, mais la réalisation ne tient pas entièrement la route.

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Le quatrième point rejoint le précédent sur le manque de crédibilité et concerne une scène précise. Sans spoiler la série pour ceux qui ne l’auraient pas encore regardée, je vais décrire au mieux la scène en question. Un des personnages est retrouvé pendu dans un arbre, à plusieurs mètres de hauteur, sans aucune chaise, ou autre élément à ses pieds et aucun accès facile pour y grimper. Même pour un novice, il est clair, en voyant cette scène, qu’il est impossible d’être en face d’un suicide, non ? Pourtant, durant plus d’un épisode, les policiers et gendarmes vont agir comme s’il s’agissait d’un suicide, jusqu’à ce que les résultats d’autopsie confirment la thèse du meurtre. Ce manque de crédibilité est assez décevant pour une série policière. Après tout, si vous avez regardé suffisamment de films et séries du genre, vous savez que lorsqu’une personne d’intérêt est retrouvée morte, dans une mise en scène de suicide, la police va directement douter de la thèse du suicide. Ici, rien, c’est un suicide et c’est tout ! On a un peu l’impression que le réalisateur et les scénaristes avaient besoin de retarder une révélation pour être sûrs d’arriver à six épisodes. Donc, il s’agit ici d’un point très décevant pour les fans du genre…

39093630.jpg-r_1280_720-f_jpg-q_x-xxyxxEnfin, le dernier point est aussi bancal que le précédent : le point de départ du mystère. Deux jeunes garçons sont dans une cabane, partageant un moment d’intimité, et sont témoins d’un massacre. Le tueur a vu l’un d’eux. Yann (Jules Houplain) et Lucas (Victor Meutelet) se mettent d’accord de ne pas parler à la police. Pourquoi ? Parce que personne ne doit savoir ce qu’ils faisaient dans la cabane. OK, on est dans un petit village, les gens ne comprendraient pas, le père de Lucas refuserait l’homosexualité de son fils, etc. Tous ces arguments sont valables. Cependant, pourquoi est-ce qu’ils devraient révéler les véritables raisons de leur présence dans la cabane ? Après tout, il s’agit de deux ados, ils auraient pu vouloir passer une soirée tranquille après avoir fait du vélo, à boire un verre en cachette ou fumer discrètement, etc. Bref, il existe de nombreuses raisons pour que deux jeunes passent une soirée ensemble, sans qu’elles ne soient nécessairement de nature sexuelle. Ici aussi, on a un peu l’impression d’être face à une fausse excuse parce qu’il fallait un élément déclencheur pour la série et qu’il n’y avait rien d’autre à faire…

En conclusion, Les innocents est une série qui peut plaire et distraire, mais pour les fans du genre, pour les accros au crédible, il y a de nombreux bémols qui peuvent ternir la qualité artistique des acteurs et la beauté des paysages…

 

 

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                                                                                                Harmonie Maquinay

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