The Choice

The Choice

Travis est un homme à femmes, le genre beau brun ténébreux qui aime séduire mais coupe les ponts dès que les relations deviennent trop sérieuses. Lorsque Gabby Holland (Theresa Palmer) emménage à deux pas de son havre de solitude, ils deviennent rapidement amants. Mais la vie va les mettre à rude épreuve…

Enième adaptation littéraire de l’auteur à succès Nicholas Sparks, le film se déroule aux yeux du spectateur comme une fresque romantique du genre tire-larmes, pour franciser l’expression anglaise consacrée. Ross Katz, le réalisateur, ne semble avoir été qu’une marionnette sous la houlette de l’auteur, très à cheval sur la transposition de ses récits à l’écran. Et de fait, l’histoire de Travis et Gabby en rappelle d’autres, s’insérant dans le schéma mélodramatique “Sparksien” déjà largement adapté au cinéma (Message in a Bottle, 1999 ; A Walk to Remember, 2001 ; The Notebook, 2004, etc.). Bloqué dans les carcans imposés par ce modèle et par le roman dont il est adapté, que vaut donc ce film?

S’ouvrant sur les paysages côtiers de l’est des Etats-Unis, le réalisateur offre une série de très beaux plans, carte postale de paysages idylliques dans lequel être malheureux semble impossible. Ce sentiment est appuyé par la nonchalance dans laquelle on découvre Travis, entouré de ses amis, vivant la belle vie et flirtant allègrement. Cette attitude de façade cache néanmoins une solitude, une mélancolie qui ajoute une certaine profondeur au personnage dans les premières minutes du film. Avec l’arrivée de Gabby, rapidement exaspérée par les manières de son voisin, une attraction mutuelle se développe et cette volonté de solitude est soudain mise à mal.

Pour l’un comme pour l’autre commence alors un jeu de séduction qui constitue l’apogée du film. Les dialogues fusent, les répliques sont cinglantes, les personnages sonnent juste. Dans sa volonté de représenter l’attraction-répulsion inextinguible qui lie ces deux êtres que tout sépare, l’auteur dépeint avec brio les prémisses d’un amour qui transcende les distances. Très vite, ils finissent cependant par s’unir, et les deux amoureux sonnent alors bien trop tôt le glas du film.

Et quand les premiers défauts apparaissent, ce n’est que l’arbre cachant la forêt. Le couple Walker – Palmer, jusqu’alors intéressant, sombre dans la mièvrerie et la prévisibilité, tant les obstacles s’effacent devant eux, à l’image des parents de Gabby qui côtoient les limites du ridicule. Les personnages principaux deviennent imbuvables, particulièrement à travers une Theresa Palmer horripilante, et l’on se prend à préférer suivre l’histoire du père ou de la soeur de Travis, pourtant écrits comme de purs adjuvants du récit principal. Le trait mélodramatique se force, la beauté des paysages laisse place à des plans anodins, et les situations s’enchaînent de manière conventionnelle comme si l’intérêt de l’auteur pour sa propre histoire s’amenuisait.

Alors que le film semblait traiter d’un amour qui transcende les barrières, il apparaît rapidement que celui-ci n’est possible que dans un certain modèle de valeurs de plus en plus discutable, sur fond de morale judéo-chrétienne aussi subtilement exprimée qu’un poster de chats. Dans sa seconde moitié, le film prend de plus une direction thématique des plus douteuses. D’un côté, il représente des afro-américains cantonnés aux seconds rôles et au Gospel face à un public entièrement blanc. De l’autre, la féminité pourtant bien mise en place au début du récit s’écroule, à la fois sous le poids du péché originel mais aussi parce qu’elle pèche en remettant en question l’amour “vrai” de l’homme simple et vertueux. Et c’est sans compter avec un rapport d’adoration du passé tendancieux, dans des régions étasuniennes où celui-ci n’est pas forcément glorieux.

“Ne détestez jamais un film”, a dit Tarantino, et il est vrai que dans chaque film comme dans celui-ci, il y a toujours un instant de qualité, une image qui marque les esprits, une idée lumineuse. Ross Katz, dans la plus grande partie de son adaptation du roman de Nicholas Sparks, ne nous rend cependant pas la chose facile.

Kévin Giraud-Yancy

Titre : The Choice

Réalisation : Ross Katz

Scénario : Nicholas Sparks, Bryan Sipe

Interprétation : Benjamin Walker, Theresa Palmer, Alexandra Daddario, Maggie Grace, Tom Wilkinson

Genre : Romance / Drame

Date de sortie : 17 février 2016