Seul sur Mars de Ridley Scott

Seul sur Mars

de Ridley Scott

L’enjeu de Seul sur Mars est très simple : un personnage seul en milieu hostile doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour survivre. La volonté d’un être humain d’échapper à une mort certaine est une motivation facile à comprendre et à partager. Sans surprise, c’est un canevas utilisé par de nombreux films, de La Proie Nue (1966) à All is Lost (2013). Le dernier film de Ridley Scott, The Martian en anglais, parvient à se démarquer de ces films de survival par son ton surprenant.

Laissé sur Mars par ses compagnons de voyage qui le croient mort, l’astronaute et botaniste Mark Watney (Matt Damon) est blessé, sans moyens de communication avec la Terre, sur une planète impropre à la vie. La situation est pour le moins sinistre mais il parvient à lutter contre l’adversité grâce à son ingéniosité ainsi qu’avec l’aide d’un solide sens de l’humour qui donne à Seul sur Mars une légèreté inattendue. Les vidéos de bord que Mark réalise pour tromper l’ennui lui permettent de ne pas perdre la raison, mais également de partager avec le spectateur ses stratagèmes de survie dans leurs moindres aspects. Ces scènes de one-man show scientifique tombent souvent dans l’exposition mais fonctionnent grâce à la performance charismatique et nuancée de Matt Damon, dans le rôle d’un homme finalement assez commun, profession mise à part.

Le film ne se passe pas uniquement sur la planète rouge puisqu’il développe son récit dans trois « lieux » différents : la Terre depuis laquelle la NASA s’épuise à trouver des solutions pour ramener Mark, le vaisseau spatial en voyage de retour dans lequel il aurait dû se trouver et bien sûr Mars. En multipliant les points de vue, le long-métrage garde un rythme efficace et sa série de personnages forts lui donne une plus grande ampleur. Jessica Chastain, Chiwetel Ejiofor, Sean Bean et une pléthore d’acteurs talentueux laissent une vive impression sur le spectateur dans des rôles secondaires bien écrits.

Seul sur Mars n’est jamais très loin d’une publicité pour la célèbre agence spatiale, célébrant bruyamment le courage, la détermination et l’intelligence de ces scientifiques qui essaient de ramener Mark sur Terre. Si la fascination exprimée par les auteurs du film à l’égard de la NASA est peut-être exagérée, elle n’en est pas moins sincère. C’est une célébration de l’esprit humain et de sa capacité à résoudre les problèmes les plus complexes par la réflexion et la coopération. Le film se garde bien de s’interroger sur les implications éthiques du coûteux sauvetage de Mark, préférant défendre un humanisme triomphant dans lequel sauver la vie de l’astronaute est toujours « la bonne chose à faire », d’un point de vue moral comme médiatique.

La bande-son disco, mêlant ABBA et David Bowie, fait écho à l’optimisme et au ton bon enfant qui guide le film. Seul sur Mars ne minimise par pour autant les épreuves traversées par ses personnages. L’humour et la musique sont surtout des moyens de survie pour ceux-ci, leur permettant de gérer les multiples dangers et difficultés auxquels ils sont confrontés. Dans Seul sur Mars, l’ennemi n’est pas un Alien, mais les jours qui passent, les vivres qui diminuent et les lois de la physique.

Ridley Scott a trouvé dans le script de Drew Goddard (adapté d’un roman d’Andy Weir) une histoire à la hauteur de ses talents, à la fois humaine et spectaculaire. Sa réalisation est pleine d’assurance, alternant avec aisance des scènes de discussions animées à des moments plus contemplatifs. Seul sur Mars n’est pas exempt de défauts mais le savoir-faire technique mis en place, son humour et son humanité suffisent à en faire le meilleur film de Ridley Scott depuis longtemps.

Adrien Corbeel

Titre : Seul sur Mars (The Martian)

Réalisateur : Ridley Scott

Interprètes : Matt Damon, Jessica Chastain, Chiwetel Ejiofor, Jeff Daniels, Sean Bean

Genre : Science-fiction

Date de sortie : 7 octobre 2015