« Us » : quand chasseur et proie se confondent.

 

Résumé du film :  Par une belle soirée d’été le long de la côte californienne, un couple et sa fille se baladent gaiement dans une fête foraine. Tandis que le père joue aux machines à sous, la petite fille s’éloigne et atterrit dans une maison d’horreur où elle rencontre, terrifiée, son double en chair et en os.  Quelques années plus tard, cette petite fille, désormais mariée et mère de deux enfants, revient passer des vacances dans la maison de ses parents non loin du lieu où elle a vécu son expérience traumatisante. De retour d’une journée à la plage, elle aperçoit devant sa maison les ombres de quatre personnes ressemblant étrangement aux membres de sa famille.

Critique : Les premières scènes du film suscitent dès le départ l’intérêt du spectateur : à mesure que la caméra suit la petite fille marchant au bord de l’eau, pomme d’amour à la main et comme hypnotisée par cette maison inquiétante, la tension augmente et est palpable dans la salle obscure. La succession des miroirs dans le palais des glaces, la terreur sur son visage, son mutisme et le lancement du générique accompagné d’une musique de cathédrale donnent le ton, remplissent parfaitement leur mission d’accroche et rendent le public avide d’en savoir plus.

Pourtant, force est de constater que cet intérêt retombe assez vite. En effet, on assiste ensuite à un enchaînement de scènes aux dialogues sans intérêt, transitions meublantes vers le cœur de l’intrigue annoncé dans le « trailer » : la rencontre des protagonistes avec leurs clones, évidemment maléfiques, et leur intention d’encercler la maison familiale. Loin de nous emmener dans un huis clos insoutenable et pervers à la manière d’un « Funny games » à la Michael Hanneke (était-ce un clin d’œil du réalisateur ?), le film bascule rapidement dans une scène digne d’un « slasher movie », la classique course poursuite entre les psychopathes, ici armés de paires de ciseaux brillantes et aiguisées, et les héros qui saisissent ce qui leur tombent sous la main pour se défendre, non sans lâcher quelques répliques prétendument humoristiques. Cette chasse va durer tout le film pour aboutir à une révélation finale qui ne convainc pas. La déception est d’autant plus forte que l’idée de base a un véritable potentiel qui mérite une analyse moins superficielle : quoi de plus fascinant que d’être confronté à son propre côté sombre, d’affronter ses démons, de trouver en soi les clés de la délivrance ?

Cependant, tout n’est pas négatif dans cette deuxième réalisation de Jordan Peele, qui avait d’ailleurs fait mouche précédemment avec « Get out » : il donne un vent de fraicheur au genre horrifique où les acteurs afro américains remplissent historiquement le second rôle pour finir dès le début en chair à pâtée. Par ailleurs, la bande originale du film, composée par Michael Abels, est une pépite mêlant différents styles musicaux, laquelle crée une atmosphère envoûtante et contribue en grande partie à laisser un ressenti moins négatif du film. Ensuite, on ne peut que remarquer les nombreuses références aux codes des films d’horreur classiques réalisés par des Wes Craven ou John Carpenter, références particulièrement bienvenues si vous êtes aficionado du genre, comme notre narratrice. A souligner également, l’interprétation habitée de Lupita Nyong’O et enfin, « last but not least », une scène finale de ballet joliment orchestrée et en épilogue, un twist digne d’un bon M. Night Shayamalan.

 

En somme, malgré quelques éléments forts, le scénario d’« Us » est basé sur des bonnes idées  malheureusement insuffisamment exploitées.

 

Us, de Jordan Peele (Etats-Unis, 2019), avec Lupita Nyong’o, Winston Duke, Elisabeth Moss…https://www.youtube.com/watch?v=1tzFRIQfwXg  (trailer)

 

Emily Bendib

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